Et si on arrêtait de taxer le travail ? Réflexion sur l’avenir fiscal de la France

La fiscalité française repose encore sur le travail, mais l’automatisation et l’intelligence artificielle changent tout. Cet article explore pourquoi une réforme fiscale profonde est inévitable. De la TVA sociale à la taxation écologique, découvrez des pistes concrètes. Un regard clair et engagé sur l’avenir de notre modèle fiscal en France.

ANALYSE ECONOMIE

Oliver Sev

9/29/20254 min read

Depuis longtemps, je m’interroge sur l’avenir de la fiscalité française. Mes lectures, mes discussions et mes observations m’ont conduit à une conviction : notre modèle fiscal actuel ne survivra pas à la révolution portée par l’automatisation, l’intelligence artificielle et la mondialisation.
Je vous propose ici une réflexion personnelle, appuyée sur des chiffres et des pistes concrètes, pour comprendre pourquoi une réforme fiscale profonde est inévitable.

D’où venons-nous ? Ma lecture des chiffres-clés de la fiscalité

Contrairement aux idées reçues, la France ne manque pas de recettes fiscales. Chaque année, l’État collecte environ 1 500 milliards d’euros. Rapporté aux 67 millions d’habitants, cela équivaut à 23 000 € par personne. En se concentrant uniquement sur la population active, cela représente environ 70 000 € de prélèvements par travailleur.

Alors pourquoi avons-nous le sentiment d’un État en faillite ? Non pas par manque d’argent, mais par un problème de gestion et d’allocation des recettes. Notre système fiscal n’a tout simplement pas évolué au rythme du monde.

La fiscalité française : un système centré sur le travail

Aujourd’hui, la majorité des prélèvements repose sur le travail :

  • 34 % via cotisations sociales et charges

  • 17 % via la consommation (TVA et taxes)

  • 7 % via l’impôt sur le revenu

  • 4 % via l’impôt sur les sociétés

Le reste (propriété, carburants, successions) ne représente qu’une fraction minime. Autrement dit, notre modèle fiscal est bâti sur la taxation de la main-d’œuvre, considérée historiquement comme stable. Mais cette base s’effondre.

Automatisation et IA : la fin de la base taxable traditionnelle

Avec la montée de l’automatisation et de l’IA, non seulement les emplois industriels disparaissent, mais désormais ce sont aussi les métiers qualifiés, du tertiaire à la santé, qui sont menacés. Dans moins de dix ans, la contraction de l’emploi taxable sera massive.
Moins de salariés signifie mécaniquement moins de recettes fiscales. Le système actuel est donc condamné à l’obsolescence.

Pourquoi taxer davantage le capital ne suffit pas

Certains avancent qu’il suffirait de taxer les riches. Mais même en ponctionnant 100 % de la fortune des plus grands milliardaires, cela ne financerait que quelques mois de dépenses publiques. Le capital, de plus, est hautement mobile et s’échappe dès que la fiscalité devient trop lourde.
Sans une coordination internationale, taxer le capital reste inefficace.

La solution : taxer la vraie création de richesse

Demain, la valeur ne viendra plus du travail humain, mais des robots, algorithmes et plateformes numériques. Il faut donc basculer vers :

  • une taxation de la production automatisée

  • des cotisations sur la data et l’IA

  • une fiscalité basée sur la valeur ajoutée réelle, qu’elle soit créée par un homme ou par une machine

C’est une refonte profonde de notre système fiscal, mais indispensable pour garder une base stable.

La piste de la TVA sociale intelligente

Une autre option est d’adapter la TVA :

  • 0 % sur les produits de première nécessité (pâtes, papier toilette, smartphone d’entrée de gamme)

  • taux intermédiaire pour les biens standard

  • taux élevé sur le luxe et le superflu

Cette approche responsabilise la consommation : chacun contribue selon son mode de vie, et non uniquement par son salaire.

Fiscalité écologique et droits de douane intelligents

À mes yeux, la fiscalité écologique doit être un pilier du futur système :

  • Taxe carbone sur les produits importés

  • Modulation selon la réparabilité et la durabilité

  • Encouragement de l’économie circulaire

Ainsi, on passe d’un système qui punit le travail à un système qui valorise la consommation responsable et protège la planète.

Repenser la fiscalité comme un choix individuel

Un modèle fiscal moderne ne doit pas être perçu comme une punition, mais comme un choix citoyen. Avec un allègement des charges sur le salaire, chacun disposerait de plus de revenu net, mais contribuerait par sa consommation :

  • peu taxé sur l’essentiel

  • fortement taxé sur le luxe

La technologie permet aujourd’hui cette fiscalité fine et personnalisée, grâce au digital et à la traçabilité.

Sortir du piège du “recyclage miracle”

Plutôt que de subventionner le neuf jetable et le recyclage énergivore, il faut encourager :

  • la réparation

  • l’upgrade des produits

  • la consigne

  • la lutte contre l’obsolescence programmée

C’est une fiscalité qui valorise la durabilité et qui aligne économie et écologie.

Pourquoi ce grand soir fiscal est inévitable

En résumé : moins de travail = moins de recettes = risque de crise sociale.
À l’horizon 2030-2035, la France devra repenser son modèle. Comme les révolutions passées (fin de la dîme, invention de l’imprimerie, arrivée d’Internet), nous sommes à l’aube d’un nouveau contrat fiscal. L’ignorer, c’est courir vers le chaos.

Une fiscalité pour retisser du lien social

Au-delà de la technique, cette mutation fiscale doit aussi répondre à une crise humaine. Dans une société où beaucoup n’auront plus de métier, la fiscalité peut redonner du sens, renforcer le lien social et permettre à chacun de contribuer autrement.

Ma conviction : transformer une contrainte en opportunité

Cette réforme est inévitable. Mais nous avons une chance unique : en faire une opportunité.
En repensant notre fiscalité, nous pouvons bâtir un système qui :

  • protège sans étouffer

  • responsabilise sans punir

  • valorise l’innovation, la réparation et la durabilité

C’est en débattant, en proposant et en imaginant collectivement que nous inventerons un modèle fiscal plus juste, plus libre et plus durable.